Nous refusons de verser le RSA de décembre et nous en appelons à l’État
Publié le vendredi 10 novembre 2017
Hier, en séance du Conseil départemental, nous avons à nouveau dénoncé l’impasse dans laquelle nous nous trouvons par rapport au paiement du RSA. Ces dépenses augmentent en effet (+ 46% depuis 2010) sans compensation par l’État. Nous n’avons eu d’autre choix que de prendre une décision radicale : le non-paiement du RSA de décembre à la CAF. Les allocataires ne seront pas impactés, mais le but est bien que l’État prenne ses responsabilités. Voici quelques extraits de mon discours.
Cette année, notre pays a connu d’importantes échéances politiques et de profonds bouleversements politiques. Beaucoup de commentateurs, beaucoup d’acteurs politiques eux-mêmes ont théorisé la fin d’un « ancien monde » et l’avènement d’une nouvelle ère, véritable aube démocratique faite d’un mélange subtil de courage, de responsabilité, de modernité.
[…]
Alors effectivement un certain nombre de choses ont changé. Mais malheureusement, depuis plusieurs mois maintenant, ces changements ont souvent été des mauvais coups portés aux quartiers populaires et à la Seine-Saint-Denis. La liste serait trop longue si on devait la faire toute entière, mais comment ne pas dénoncer un certain nombre de mesures qui sont déjà prises ou d’autres qui semblent se préparer.
Cela a commencé par un décret subreptice qui annulait plusieurs millions de crédits de politique de la ville et qui va mettre à mal des projets très concrets portés par les associations de notre territoire avec le soutien des villes et du Département pur nombre d’entre elles. Un exemple au hasard : le dispositif ACTE pour les collégiens temporairement exclus, dont chacun reconnait la pertinence, et qui se voit amputer de la moitié de ses crédits. La lune de miel entre l’État et les collectivités que le chef de l’État semblait vouloir installer un jour plus tôt lors de la grande conférence des territoires aura donc duré quelques heures.
Cela a continué par les annonces sur la suppression des emplois aidés, sur lesquels on a entretenu, à quelques jours de la rentrée scolaire, un flou artistique insupportable. Chacun sait ici que ces emplois aidés ne sont pas des emplois inutiles quand il s’agit de faire vivre des associations de proximité ou des services d’intérêt général, en plus de donner à des personnes souvent très éloigné de l’emploi une autre perspective que le RSA. J’ai clairement demandé au préfet que puisse être reconduit le même nombre de CAE dans nos collèges.
Cela s’est aggravé par les décisions catastrophiques pour le modèle des HLM. Là encore, le gouvernement coupe et dit : les autres n’ont qu’à assumer les conséquences à ma place. Dans notre département, c’est l’office dont nous sommes la collectivité de référence qui risque de voir ses projets de construction ou de réhabilitation fortement impactés. Et c’est la même chose pour de nombreux offices municipaux. Je crois que nous devons mener un combat collectif très offensif pour que le gouvernement revoie sa copie.
Alors bien sûr, à chaque fois, on se tourne vers les collectivités en disant : elles n’ont qu’à compenser. Ces mêmes collectivités auxquelles on demande par ailleurs sans cesse des efforts comme si ce n’étaient pas déjà elles qui avaient assumé les 2/3 de la réduction des dépenses publiques depuis 5 ans. Pire, en introduisant dans la loi de finances d’idée de « contrats » obligatoires ce qui est l’antithèse même de l’idée de contrat, et conclus sous la menace financière, on assiste, en plus de l’étranglement financier, à un vrai retour en arrière sur la décentralisation et sur des principes pourtant constitutionnels.
[…]
Mais nous sommes un département combatif, et c’est pourquoi j’ai souhaité que nous montrions à l’État que cela ne pouvait plus durer et que nous ne pouvons plus accepter que d’un côté on nous fasse la leçon comme à de dangereux irresponsables en mettant en place des mécanismes de tutelles, et que de l’autre on oublie que depuis des années, c’est nous qui assumons à sa place un nombre sans cesse croissant d’engagements qui relève purement et simplement de la solidarité nationale.
Car mes chers collègues, les baisses de dotations que nous avons connues, ce n’est hélas pour le Département que la partie émergée de l’iceberg. Bercy oublie toujours très pudiquement que nous assumons à la place de l’État la solidarité nationale. Rien que cette année, le reste à charge pour le Département des trois allocations de solidarité (RSA, APA, PCH) va s’élever à 260 millions d’euros. Plus que tous les investissements que nous serons en capacité de faire cette année. Depuis 2004, et cela peut donner le vertige, ou la nausée devant l’injustice qui nous est faite, nous aurons, tenez vous bien, assumé à la place de l’État plus de 2,2 milliards d’euros. Et certains ont l’indécence de nous donner des leçons de gestion comme si nous ne faisions pas déjà les économies à la place de l’État ?
C’est le sens de cette décision modificative qui acte notre refus de continuer à assumer seuls la solidarité nationale face à l’État : le gouvernement a entretenu le plus grand flou sur la réalité d’un fonds d’urgence pour 2017 qui nous permettrait d’absorber au moins la hausse, donc je n’inscrirai pas de crédits supplémentaires pour venir absorber l’incurie de l’État. Je demande a minima que l’intégralité de la hausse soit compensée par le fonds d’urgence. Pour mémoire, l’année dernière nous avions pu percevoir 24 millions d’euros du fonds d’urgence du RSA […] .
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