Projet de loi « asile et immigration » : une logique purement comptable et proprement inhumaine
Publié le jeudi 3 mai 2018
Adopté en première lecture le dimanche 22 avril à l’Assemblée nationale, le projet de loi « asile et immigration » est un texte dangereux, qui foule au pied les droits et libertés des personnes d’origine étrangère.
A la logique de dignité et la tradition d’accueil qui font l’honneur de notre pays s’oppose ainsi une logique comptable et répressive transparaissant tout le long de la loi « asile et immigration ».
Le projet de loi prétend proposer des mesures « efficaces et équilibrées » en améliorant d’un côté le droit d’asile (accélération des délais, sécurisation de certains titres de séjour), et en renforçant de l’autre les expulsions des personnes en situation irrégulière. Il s’agit donc clairement de favoriser une « immigration choisie ». En dissociant ainsi asile et immigration, on créera un système inégalitaire où l’on trie les « bons migrants » d’un côté et les « mauvais migrants » de l’autre.
Par ailleurs, même pour les demandeurs d’asile, plusieurs dispositions de ce texte remettent véritablement en cause le principe même du droit d’asile.
Certaines garanties qui lui étaient attachées sont en effet largement menacées par des dispositions qui complexifient les démarches. Réduction des délais de procédure – notamment pour déposer un recours devant la Cour nationale du droit d’asile (d’un mois à quinze jours) -, retour au caractère non-suspensif de certains recours vis-à-vis des mesures d’éloignement, encore augmentation de la durée maximale de la rétention administrative (de 45 à 90 jours)… Toutes ces mesures vont à contre-sens d’un recours facilité au droit d’asile, et s’inscrivent plutôt dans un processus de dissuasion.
L’une des mesures les plus inhumaines – osons le mot – de cette loi réside enfin dans la possibilité de placer des familles en rétention, entraînant de fait l’enfermement de mineurs.
La fermeté tant prônée par le gouvernement est ici confrontée au principe même d’humanité, de décence et de dignité des personnes.
Il est indéniable qu’une refonte du système de l’accueil du primo-arrivant en France et de l’accès à la demande est aujourd’hui nécessaire, cette étape étant actuellement trop longue et complexe. Cela apparaît essentiel, car c’est uniquement une fois que la personne a déposé son dossier de demande d’asile qu’elle peut, éventuellement, bénéficier d’un logement et de tous les droits qui en découlent. Néanmoins, force est de constater que la réforme proposée ici par le gouvernement a comme seule ambition de complexifier et donc de dissuader le recours à l’asile.
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