Un an de présidence Macron, d’échecs en déceptions
Publié le dimanche 6 mai 2018
Aujourd’hui, dimanche 6 mai, cela fait donc tout juste un an que les Français ont élu à la Présidence de la République Emmanuel Macron. Longue est déjà la liste des échecs et des déceptions.
A commencer par la question écologique : si la formule du « Make our planet great again » a pu faire mouche au départ, le manque de décisions concrètes prises à l’issue du One planet summit, ou encore le désengagement de l’État des dispositifs de soutien à la transition énergétique, montrent que les beaux discours sont restés lettre morte.
En outre, si certains ont pu croire qu’Emmanuel Macron mènerait une politique humaniste d’ouverture au monde, pouvant être considérée comme « progressiste » en matière d’accueil des réfugiés, nombreux sont ceux qui déchantent face à la politique migratoire répressive du « premier flic de France » Gérard Collomb.
Que dire enfin de la réforme de l’entrée à l’université, qui acte une logique de sélection assumée abandonnant l’objectif de démocratisation de l’enseignement supérieur et introduisant une discrimination sociale insupportable. Ou de la réforme ferroviaire, avec laquelle le gouvernement veut non seulement supprimer le statut historique des cheminots, mais ne prend absolument pas la mesure des investissements à réaliser pour le service public du train, en méprisant les mouvements sociaux pourtant actifs depuis des semaines ? Sur le fond comme sur la forme, la méthode Macron heurte.
En Seine-Saint-Denis, nous avons pu tout particulièrement le constater : la réforme territoriale, que nous a promise Emmanuel Macron l’été dernier, prédisait purement et simplement la disparition de notre collectivité avec le reste des départements de la petite couronne. Ceci dans une logique exclusivement comptable et technocratique, sans que l’exécutif ait en aucune manière consulté les élus et les citoyens. Un autre sujet nous inquiète particulièrement : les reculs de l’État sur le calendrier du Grand Paris Express, projet de transports structurant et même vital pour effectuer notre rattrapage et que certaines villes en Seine-Saint-Denis attendent parfois depuis vingt ans.
Par ailleurs, si certains, à gauche, espéraient qu’il mènerait une politique également favorable aux plus modestes, l’année écoulée a montré un Emmanuel Macron en habits de Président des (très) riches plutôt qu’en Robin des Bois désireux de corriger les inégalités économiques et sociales.
Formant le vœu pieux d’un « investissement accru dans l’économie productive », les députés de la République En Marche (LREM) ont supprimé l’impôt sur la fortune (ISF), pour le remplacer par un simple impôt sur le patrimoine immobilier (IFI) ne reposant que sur les avoirs immobiliers, sans prendre en compte le capital financier, étant de fait moins lourd. Par ailleurs, la mise en place de la « flat tax », prélèvement forfaitaire unique de 30 % sur les revenus financiers, efface la réforme – mise en place sous le quinquennat Hollande – qui taxait les revenus du patrimoine au barème de l’impôt sur le revenu, pour plus d’équité et d’efficacité. Et aujourd’hui, c’est l’« Exit Tax », mise en place en 2011 par cet affreux gauchiste de Nicolas Sarkozy, que l’on supprime, sous prétexte qu’il ne faudrait pas pénaliser ceux qui font le choix de la délocalisation fiscale !
Outre le symbole désastreux de la suppression de ces systèmes d’imposition faisant mieux contribuer les plus riches à l’effort national (les 100 plus grandes fortunes réalisant chacune, grâce à Emmanuel Macron, 1,5 million d’euros d’économies !), cela a eu une incidence directe sur les caisses de l’État. Une fois encore, ce seront donc les plus vulnérables qui devront se serrer la ceinture, à commencer par les retraités qui ont le plus souffert de l’augmentation de la CSG de 1,7 point en janvier. Pourtant, nous avons plus que jamais besoin de l’action de la puissance publique, en premier lieu dans les quartiers populaires, lesquels subissent les assauts répétés et méthodiques de la politique gouvernementale menée depuis un an déjà.
Le ton a été donné dès la Loi de finances en automne, avec la réforme des APL qui a débouché très concrètement – et douloureusement – sur la ponction de 800 millions d’euros dans les ressources des organismes HLM. Pour prendre l’exemple de Seine-Saint-Denis Habitat, cela équivaut à un désengagement de l’État à hauteur de 20 % dans les opérations de rénovation urbaine menées en 2018. Il s’agit d’un véritable contre-sens économique et social, alors qu’il y a toujours 1,8 million de demandeurs de logements sociaux en France. Le gouvernement d’Édouard Philippe, chargé de donner corps aux orientations libérales et assumées d’Emmanuel Macron, procède en coupe réglée au démantèlement de notre système de solidarité et de protection vis-à-vis des plus fragiles, les attaques sur le logement social – porte ouverte à sa privatisation et financiarisation – en étant l’un des exemples les plus parlants.
Les habitants des quartiers populaires et leurs représentants, « premiers de tranchées », n’en peuvent plus d’entendre sonner dans le vide la sonnette d’alarme qu’ils tirent depuis des mois. Le rapport de Jean-Louis Borloo, créateur de l’ANRU, qui préconise pour la banlieue des investissements massifs et durables, en est un à sa manière. La balle est dans le camp d’Emmanuel Macron. Que fera-t-il des recommandations du rapport Borloo ? N’en garder que les mesures les plus « gadgets » ? A moins qu’il n’attrape la balle au bond, l’abandon des quartiers populaires s’ajoutera à la longue liste des échecs, et destructions méthodiques, des politiques menées depuis un an.
Finalement, qu’est-ce que la présidence Macron ? Depuis un an, on mesure trop souvent l’écart abyssal et répété entre les discours bienveillants et léchés du président de la République, et ses actes ; entre une communication maîtrisée et la dureté des décisions. Toute sa politique est guidée par une doctrine d’essence libérale et individualiste : la réussite de quelques uns, « premiers de cordée », entraînant la réussite de tous par un hypothétique « ruissellement ».
Nous, socialistes, défendons a contrario un modèle de société où c’est précisément le progrès collectif qui doit permettre l’émancipation des individus.
Si Emmanuel Macron donne l’impression de « surnager » dans la sphère médiatique et politique, c’est aussi par défaut et « faute de mieux », en l’absence d’une opposition de gauche à la fois combative et crédible. A nous de faire le travail et de ne pas laisser s’installer la partition « Macron ou le chaos des extrêmes », qui appauvrit et sclérose le débat démocratique chaque jour un peu plus dans notre pays.
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