Asile, immigration : des enjeux nationaux et européens face auxquels nous devons être à la hauteur
Publié le vendredi 29 juin 2018
Emmanuel Macron s’est glorifié de l’accord trouvé ce matin en Conseil européen sur la question des migrations. « C’est la coopération européenne qui l’a emporté », s’est-il exclamé, oubliant que la question majeure, à savoir la réforme de l’injuste règlement de Dublin (1), reste en suspens, faute de consensus entre des pays avec des positions très éloignées les unes des autres. En outre, ce projet de règlement européen, qui vise à durcir encore davantage le recours au droit d’asile sur notre continent, contient des dispositions véritablement discutables, notamment la question des « hotspots » dans des pays tiers. Il fait écho au projet de loi français relatif à l’asile et à l’immigration qui vient d’être voté au Sénat en première lecture et qui vise lui aussi largement à tarir le flux de réfugié.e.s arrivant sur notre sol.
Élu d’un Département accueillant un nombre important de réfugié.e.s, notamment mineur.e.s, je m’intéresse énormément aux politiques d’asile et d’immigration, qui en disent beaucoup sur le pays dans lequel nous vivons. En tant qu’observateur français, je suis plus au fait de la situation nationale, et je vous parlerai plus particulièrement du projet de loi qui vient d’être adopté au Sénat, appuyée de certain.e.s parlementaires LREM complaisant.e.s.
Après son examen à l’Assemblée nationale, le projet de loi dit « asile et immigration » était déjà un texte dangereux. Et pourtant, celui qui résulte des modifications apportées par le Sénat, où le texte sera soumis au vote aujourd’hui, est encore bien pire.
Plusieurs amendements ont en effet durci encore davantage la première version du projet de loi, en s’attaquant à l’accès aux droits des personnes d’origine étrangère. Recours plus difficile au regroupement familial, réduction de 120 à 90 jours du délai pour déposer une demande d’asile, facilitation des expulsions du territoire en cas d’immigration irrégulière, instauration d’un système de quotas pour contrôler l’immigration régulière…
Toutes ces mesures semblent converger dans le même sens : rendre plus difficiles les conditions de demande et d’obtention de l’asile, de même que l’accès aux soins ou aux transports des personnes d’origine étrangère. En vérité, nous assistons à un festival de toutes les mesures que la droite n’a jamais osé proposer quand elle était au pouvoir, et qui ressurgissent aujourd’hui dans le débat public.
Notre pays, notre Europe, méritent mieux que cette escalade dans l’indignité et l’inhumanité. Mais qu’attendre d’autre d’un président de la République qui, tout en tenant de beaux discours sur la solidarité et l’humanité, refuse d’accueillir les navires aidant les migrants en mer, et fait voter des lois à ce point dures ?
Alors qu’approchent les élections européennes de mai 2019, nous devons prendre notre part à l’effort européen, non pas en finançant des « hotspots » pour maintenir les réfugié.e.s dans les pays tiers ou « riverains », comme cela a été évoqué, mais bien avec des politiques d’accueil et d’insertion dignes de ce nom vis-à-vis des personnes réfugiées.
Nous devons en priorité soulager les pays comme l’Autriche et l’Italie, en première ligne sur les questions migratoires, et de plus en plus eurosceptiques. Premiers pays sur lesquels une immense partie des réfugié.e.s mettent le pied, ils méritent d’être aidés davantage par l’ensemble des États-membres, plutôt que de les laisser s’enfermer dans des logiques nationalistes, populistes et d’extrême-droite, particulièrement dangereuses pour la cohésion européenne.
(1) qui confie aux pays de première entrée dans l’UE la responsabilité des demandes d’asile
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