Échanges avec les soignant•e•s de l’Hôpital Delafontaine à Saint-Denis
Publié le mercredi 25 mai 2022
« On se demande si on ne va pas devoir fermer dans trois mois », m’a dit ce matin une sage-femme de la maternité de Saint-Denis.
Accompagné de Magalie Thibault et Katy Bontinck, j’ai rendu visite mardi 24 mai à ces sages-femmes, ces infirmières, ces auxiliaires de puériculture qui tiennent l’Hôpital Delafontaine. Je m’y étais rendu en octobre dernier, et je m’étais engagé à y revenir.
On pourrait croire que les visites se suivent et se ressemblent ? Mais celle-ci avait quelque chose d’alarmant, par le calme avec lequel directeur d’hôpital, cadre sage-femme et professionnel·le·s de tous secteurs nous expliquent qu’ils n’arrivent plus à faire face.
À la maternité de Saint-Denis, ce sont 27 postes de sages-femmes qui ne sont pas pourvus, sur 91.
27 absences ou postes vacants, qui renforcent la pression de l’urgence sur le quotidien. Alors pour faire face aux besoins urgents, on supprime les consultations, la préparation à l’accouchement ou la sophrologie, toutes ces activités qui permettaient de prendre du temps avec les patientes, de sortir la tête de l’eau. Toutes ces activités qui permettaient au métier d’être attractif. Et sans lesquelles on n’arrive plus à recruter, et on renforce la pénurie de soignant·e·s: c’est circulaire.
L’été arrive, et avec lui les congés. Une organisation de crise est mise en place au niveau régional sur les maternités, comparable à celle qui avait été mise en place pendant le Covid pour la réanimation : chaque place est scrutée, et les patientes sont réparties selon les places disponibles. Indépendamment du suivi qu’elles ont pu avoir dans leur établissement, indépendamment des spécificités de leur prise en charge : on pare à l’urgence.
Il faut que nos ministres se rendent compte de la situation, avant de nous annoncer un énième plan pour l’hôpital : ce n’est pas de mesurettes dont nous avons besoin. Notre hôpital nécessite aujourd’hui un choc massif et rapide pour inverser la tendance, dans un département touché comme jamais par la crise des vocations. Car non, nous ne sommes pas un département comme les autres : les besoins y sont parfois plus grands, et les conditions de vie, de logement, de prise en charge des enfants, parfois plus difficiles.
Il y a l’urgence : l’Etat doit autoriser les étudiant·e·s sages-femmes en 4e année d’étude à exercer à l’hôpital public. Il doit mobiliser des logements du parc social pour permettre aux soignant·e·s de se loger. Il faut faire face le mieux possible aux mois qui arrivent, et cela nécessite des mesures de grande ampleur.
Et il y a l’avenir. Car l’avenir ce sont elles et eux. Ces professionnel·le·s du soin, du lien, du social, que partout nous n’arrivons plus à recruter. Il y a la question des rémunérations, bien entendu, mais ici elles ont été puissamment revalorisées : + 1085€ bruts mensuels pour une sage-femme en première année d’exercice à Saint-Denis par rapport à 2020 ! Mais encore faut-il former suffisamment de professionnel·le·s. Il nous faut augmenter le numerus clausus. Nous avons besoin de nouvelles écoles de sages-femmes. Il faut réguler l’installation sur le territoire pour toutes les professions médicales, pour que l’on s’attaque résolument au problème des déserts médicaux.
Depuis des années que je m’engage dans notre département, je vois que nous ne pouvons compter que sur nous-mêmes. Un nouveau gouvernement arrive et il faut tout recommencer. Peut-être le suivant sera-t-il plus favorable aux services publics ? Je nous le souhaite ! En attendant il y a urgence et nous nous trouverons aux côtés de toutes celles et tous ceux qui défendent et font vivre, au quotidien, nos services publics.
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